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Survivre à la violence et renforcer la résilience: Extraits d’un rapport sur le réseau canadien de refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence – Volet 1

Ce texte est une première partie sur le rapport du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des Communes au sujet de la situation des refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence publié en mai 2019.

Ce document s’articule autour de cinq thèmes :

  1. Un portrait du réseau des refuges et maisons de transition pour les femmes et les enfants affectés par la violence;
  2. Le financement de ce type de ressources;
  3. Les difficultés qui en entravent l’accès;
  4. Les éléments de solutions pour aider les femmes à leur sortie d’un refuge;
  5. La prévention de la violence faite aux femmes par un partenaire intime.

Au Canada, la violence faite aux femmes est une crise de santé publique. Elle peut avoir des conséquences physiques et psychologiques profondes et durables sur les victimes. Lorsqu’ils fuient la violence, les femmes et les enfants doivent pouvoir se réfugier dans un endroit sécuritaire et recevoir des services de soutien appropriés. Cependant, au Canada, les refuges et les maisons de transition ne fournissent pas assez de lits et de services pour répondre à la demande et les niveaux de service diffèrent selon les régions du pays.

Le dénombrement de 2018 nous apprenait que 23 % des personnes en situation d’itinérance visible rencontrées à Montréal le 24 avril 2018 étaient des femmes. On y apprend qu’elles étaient plus susceptibles de se trouver dans des ressources de transition (35 %) et en itinérance cachée (22 %). Une plus grande proportion de femmes (22 %, contre 13 % pour les hommes) étaient Autochtones – et tout particulièrement Inuites (8 %, contre 1 % pour les hommes). Enfin, en lien avec le rapport du Comité, on apprend grâce au dénombrement, que 18 % des femmes avaient perdu leur logement à la suite de mauvais traitements par un époux ou conjoint.


Les travaux et recommandations du Comité méritent donc qu’on s’y attarde avec la perspective de mettre fin à l’itinérance.

Vingt recommandations émaillent du rapport. Elles ont pour principaux objectifs :

  • de combler l’écart entre l’offre et la demande de places dans les refuges et les maisons de transition au Canada pour les femmes et les enfants victimes de violence;
  • de faire en sorte que les femmes et les enfants des milieux urbains, ruraux ou éloignés qui sont victimes de violence, y compris les femmes autochtones, puissent recevoir des services de niveau comparable dans les refuges et les maisons de transition, peu importe l’endroit où elles habitent au Canada, et que ces services soient spécialement adaptés à leurs besoins;
  • accroître l’accès des femmes à des logements sécuritaires et abordables et aux mesures de soutien dont elles ont besoin.

Le présent texte résume les entraves identifiées par le Comité

Quitter la relation abusive
Pour plusieurs, les motifs économiques sont déterminants, « il n’est pas toujours possible de trouver un logement sécuritaire et abordable» et « [q]uitter une relation violente peut aussi se solder par la perte d’un emploi » (p. 28). Si les femmes ont des enfants, elles peuvent aussi craindre d’en perdre la garde si elles se tournent vers un refuge. À ce chapitre le Comité n’énonce pas de recommandations, mais évoque quelques solutions potentielles en cas de violence conjugale, notamment l’établissement d’un salaire de subsistance, le renforcement des normes nationales relatives aux prestations d’aide sociale ou encore des congés payés.

Les services d’hébergement
Le nombre d’éléments en rapport aux services d’hébergement en gêne aussi l’accès. Au premier chef, le Comité souligne le manque de lits disponibles. De plus, les critères d’admissibilité représentent, en quelque sorte, autant de critères d’exclusion. Également, toutes les ressources ne sont pas vouées aux mêmes types de situation. Certaines peuvent accueillir des enfants, d’autres pas; certaines sont dédiées à des groupes d’âge spécifiques. Sans en faire des recommandations formelles, le Comité souligne des solutions énoncées dans les mémoires ou lors des auditions publiques : augmenter la capacité du réseau des refuges ou « créer d’autres endroits sécuritaires pour répondre à la demande » (p.31). Outre les limites de capacité, certaines des règles de fonctionnement, même parfaitement légitimes, des organismes résorbent davantage l’accès à ces services.

Les mesures d’aide et les services sociaux
L’hébergement n’est qu’un des aspects des besoins des femmes et de leurs affectés par la violence. D’autres services sont souvent requis : orientation, accompagnement psychologique, intervention post-traumatique, représentation et aide juridique, services communautaires et administratifs, aide au logement, services axés sur les besoins des enfants, etc. Or, ces services ne sont pas toujours disponibles, ni en variété nécessaire, ni en quantité suffisante en raison du manque de financement, du manque de personnel qualifié ou de l’épuisement du personnel en place. Plus globalement, certains services gouvernementaux contribuent à limiter ou retarder l’accès à certains services (Pour l’instant, il n’est pas permis aux femmes abusées de suivre des formations si elles reçoivent des prestations d’assurance-emploi; l’agence du revenu du Canada impose un délai de 90 jours à toute personne désireuse de modifier un statut de conjointe et obtenir celui de célibataire et ainsi avoir accès à l’aide sociale). Le Comité soumet trois recommandations eu égard aux mesures d’aide et aux services sociaux (pp. 36-37).

L’accès à des logements sécuritaires et abordables
Malgré l’importance des services d’hébergement pour permettre aux femmes de se retrouver en sécurité, ils doivent être vus comme des solutions temporaires. L’accès à des logements sécuritaires et abordables après l’étape de transition des services d’hébergement demeure essentiel pour la guérison des femmes et des enfants ayant vécu de la violence et la reprise de leur vie quotidienne. Malheureusement, les logements abordables sont rares dans les grandes villes canadiennes. Le comité soumet trois recommandations à ce sujet (p. 58).

Recommandation 5
Que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces et les territoires, conçoive un cadre national sur les refuges et les maisons de transition pour les femmes et les enfants qui sont touchés par toutes formes de violence fondée sur le sexe et qui se trouvent en situation d’itinérance, dont l’objectif sera d’assurer des niveaux de service comparables aux femmes et aux enfants de tout le pays et que ce cadre :

  • garantisse aux femmes et aux enfants, en particulier à ceux d’origine autochtone vivant en milieu urbain, rural ou éloigné, l’accès à une gamme complète de mesures permanentes de soutien et de services intersectionnels, culturellement adaptés et axés sur le traumatisme vécu pour aider les victimes à guérir de leur traumatisme;
  • garantisse aux femmes et aux enfants issus de milieux divers l’accès à des services et à des mesures de soutien qui répondent spécialement à leurs besoins;
  • s’attaque aux obstacles qui rendent difficile l’obtention d’un lit et de services dans les refuges et les maisons de transition pour les femmes ayant des besoins particuliers, comme celles vivant avec des handicaps ou des troubles de santé mentale ou de toxicomanie; les femmes transgenres et les personnes non binaires; les immigrantes et réfugiées, et les victimes de la traite des personnes;
  • prévoie des ententes de financement fédérales-provinciales et fédérales-territoriales ayant pour objet l’augmentation et la pérennisation de l’aide financière au fonctionnement des refuges et des maisons de transition pour les femmes et les enfants touchés par la violence.

Recommandation 6
Que le gouvernement du Canada veille à ce que l’information sur la réception des prestations administrées par l’Agence du revenu du Canada, comme l’allocation canadienne pour enfants, soit facilement accessible aux femmes qui se trouvent dans une relation violente, ou qui en ont quitté une, et celles qui habitent dans un refuge.

Recommandation 7
Que le gouvernement du Canada, en partenariat avec les peuples et les collectivités autochtones, collabore avec les provinces et les territoires :

  • pour élaborer des stratégies de lutte contre la violence fondée sur le genre et pour veiller à ce que la police et les procureurs appliquent des pratiques uniformes en ce qui concerne les survivantes de violence fondée sur le genre;
  • pour coordonner un examen national du système judiciaire afin de garantir que les survivantes de la violence contre les femmes et les filles ont un accès égal à la protection et à la justice partout au pays.

Recommandation 15
Que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces et les territoires, cherche de nouveaux moyens d’accroître l’accès à des logements abordables et à des mesures de transition, qui pourraient prendre la forme de suppléments ou de subventions au loyer facilement adaptables.


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